Sylvain Malcorps, membre du LaPIJ, a soutenu sa thèse « La fabrique collective du contenu d’information et des segments de consommateurs par les mesures de l’audience en ligne. Le cas des relations entre journalistes en ligne et marketeurs dans l’enjeu de captation de l’attention sur Internet », le 17 décembre 2020 à l’ULB.
Son travail présente l’implication conjointe de journalistes en ligne et de marketeurs dans la commercialisation du journalisme, et la façon dont ils créent ensemble de la valeur économique en s’aidant des mesures de l’audience en ligne pour faire des choix.
Comment capter l’attention de lecteurs et la maintenir dans un écosystème numérique où l’attention est une ressource rare ? Les organisations médiatiques contemporaines actives dans le journalisme sont aujourd’hui confrontées en temps réel à ces questions cruciales desquelles dépend leur capacité à rencontrer les objectifs éditoriaux et commerciaux qui y coexistent. Pour tenter d’y répondre, ces organisations et leurs travailleurs se sont progressivement équipés d’outils devant les aider à gérer la captation de l’attention d’internautes. Parmi ceux-ci, les mesures de l’audience des sites d’information occupent une place centrale et viennent tout particulièrement équiper le travail quotidien des journalistes en ligne et des marketeurs employés dans ces entreprises.
Par-delà les attentes sociales et normatives attribuées à différentes catégories de travailleurs du journalisme, Sylvain Malcorps a étudié durant deux ans et demi les relations qu’entretiennent les journalistes en ligne de lecho.be et les marketeurs de sa société éditrice (Mediafin) dans leurs usages des mesures de l’audience en ligne. Dans son travail, il met au jour comment la production de connaissances situées sur base de nombres favorise et influence un processus de coordination de travailleurs aux identités et expertises professionnelles distinctes dans les organisations médiatiques contemporaines.
Dans sa thèse, le chercheur expose d’abord en quoi l’accès et l’interprétation des mesures d’audience en ligne est l’enjeu de relations de contrôle et de pouvoir entre ces deux collectifs de travailleurs s’étant impliqués dans un processus constant d’autonomisation depuis les premiers jours du site d’information en 1996. Il identifie cependant que, une fois le site d’information devenu payant, les rapports entre journalistes en ligne et marketeurs autour des mesures de l’audience en ligne sont devenus plus fréquents au fil des années. Sylvain Malcorps étudie ensuite comment et pourquoi ces travailleurs utilisent au quotidien les mesures de l’audience en ligne. Son étude montre que journalistes en ligne et marketeurs se servent de ces mesures pour produire des connaissances situées jugées utiles pour leur travail : ils s’en servent pour choisir les caractéristiques à conférer au contenu d’information et à des segments de consommateurs-lecteurs auxquels le contenu est adressé dans le but de favoriser la lecture sur le site d’information et/ou l’achat d’un abonnement.
Enfin, son travail révèle que les mesures de l’audience en ligne favorisent des formes de coordination entre journalistes en ligne et marketeurs, tout en leur permettant de rester des collectifs de travailleurs aux tâches quotidiennes distinctes. À l’aide de nombreux exemples issus de son enquête de terrain, le chercheur expose les degrés d’intervention que des journalistes possèdent dans la définition de cibles de consommateurs d’un média et les marges de manœuvre que des marketeurs détiennent dans la fabrication du contenu d’information du média étudié.
Le jury était composé de Mmes et MM. David Domingo (Promoteur, ULB), Marie-Christine Pollet (Présidente, ULB), Catherine Janssen (ULB), Florence Le Cam (Secrétaire, ULB), Elena Raviola (Université de Göteborg, Suède), Cécile Méadel (Université Panthéon Assas, Paris 2), Alan Oukrat (Université Sorbonne Nouvelle, Paris 3) et Karin Raeymaeckers (Université de Gand).